3 sakés dignes de mention à la SAQ

 
Texte par Jean-Gabriel Vigneault Révision par Asma

Texte par Jean-Gabriel Vigneault
Révision par Asma

Quelles sont vos recommandations de sakés disponibles à la SAQ? On nous pose souvent cette question et avec raison. Même si ça nous fait plaisir de vous aiguiller, c’est parfois difficile de répondre avec des produits qui respectent nos valeurs. On préfère se tourner vers l’importation privée, mais il est bien évident que la nécessité d’acheter en caisse est un important obstacle à la consommation.

La bonne nouvelle c’est qu’il y a tout de même des sakés qui sont dignes de mention et qui méritent qu’on y dévoue de notre temps et de notre argent. Voici notre top 3 en date aujourd’hui.

 
 

 

1. Dewazakura Shuzō Dewa No Sato Junmai - 720 mL

Kura: Dewazakura Shuzō 出羽桜酒造
Marque: Dewazakura 出羽桜
Cuvée: Dewa No Sato 出羽の里
Classification: Junmai 純米
Seimaibuai: 60 %
Riz: Dewa No Sato 出羽の里
Préfecture: Yamagata 山形県

***

Prix: 29,90 $
Code SAQ: 14286572

On commence par un saké qui vient de se tailler une place pour la première fois sur les étagères des succursales. La brasserie Dewazakura tire sa renommée du fait qu’elle a été une des premières à démocratiser le style ginjō dans les années 80. En effet, ces sakés floraux, raffinés et fruités, élaborés avec un riz poli au minimum à 60 %, étaient autrefois brassés exclusivement pour les concours. Les rares exemplaires qui se rendaient sur le marché affichaient des prix assez salés. C’est justement la cuvée Oka, qu’on aime beaucoup, qui a contribué à cette popularisation durant le ginjō boom. Oka demeure un excellent rapport qualité, pour ceux qui veulent s’initier au style. 

Toutefois, Dewa No Sato offre un tout autre profil. Riche, volumineux, céréalier, mais présentant une sucrosité perceptible. Toutes des caractéristiques qui en font un compagnon pour une large palette de plats. Fait intéressant à noter: même si le seimaibuai est de 60 %, par soucis de transparence,Dewazakura classifie cette cuvée comme junmai, plutôt que junmai ginjō, afin d’être plus en phase avec ses attributs.

Qu’est-ce qui rend cette cuvée si intéressante? Eh bien, c’est que les sakés pour lesquels on peut parler de terroir, de régionalité et qui sont en vente  à la SAQ pour moins de 30 $, ne sont pas légion! Situé dans la préfecture de Yamagata, une des six préfectures de la région de Tōhoku, soit celle la plus au nord de Honshū, l'île principale du Japon, Dewazakura se fait une fierté d’être sous l’appellation GI Yamagata. Les appellations d’origine sont un phénomène assez récent dans le monde du saké, elles demeurent donc encore plutôt rares, quoiqu’en croissance. Cette appellation géographique ne nécessite pas que le riz provienne de la préfecture de Yamagata, cependant sur cette cuvée, Dewazakura utilise la variété Dewa No Sato, propre à l’identité des sakés de Yamagata et cultivée dans la préfecture même. 

Dewazakura est une kura avec une emphase sur le qualitatif, mais sa production est tout de même de taille moyenne. Habituellement, on qualifie une brasserie de « petite », lorsqu’on y produit moins de 1 500 koku (unité correspondant à 180 litres). Pour sa part, hors pandémie, Dewazakura produit annuellement environ 10 000 koku


Accord

Si on s’intéresse à un plat traditionnel de Yamagata, servir ce saké chauffé à 35-40°C, accompagné d’un bol de hippari udon serait 💥💥💥. Un accord bien riche et réconfortant.

Sinon des huîtres Rockefeller arrosées d’un trait de citron feront un mariage tout aussi réussi. 


2. Saiya Shuzōten Yuki No Bosha Limited Release Junmai Ginjo - 720 mL

Kura: Saiya Shuzōten 齋彌酒造店
Marque: Yuki No Bosha 雪の茅舎
Cuvée: Limited Release
Classification: Junmai Ginjō 純米吟醸
Seimaibuai: 55 %
Riz: Akita Sake Komachi 秋田酒こまち
Préfecture: Akita 秋田県

***

Prix: 40 $
Code SAQ: 13996396

Notre seconde sélection s’oriente sur un style tout à fait différent. La marque phare de la kura Saiya Shuzōten, Yuki No Bosha, est brassée par un des tōji les plus respectés au Japon; Toichi Takahashi. Ses sakés ont reçu 19 fois la médaille d’or à la compétition la plus réputée, soit la « Annual Japan Sake Awards » (Zenkoku Shinshu Kanpyōkai 全国新酒鑑評会). On perçoit bien la signature de Takahashi-tōji sur la cuvée Limited Release, aussi connue sous le nom « Cabin In The Snow Limited Release », où Cabin In The Snow n’est que la traduction de la marque Yuki No Bosha. Un saké subtil, fin, linéaire, pour lequel on doit réfléchir afin d’en apprécier le plein potentiel. La dernière gorgée est sans contredit meilleure de la première. 

Provenant également, de la région de Tōhoku, mais cette fois-ci de la préfecture d’Akita, il s’agit certainement d’un saké nordique, où les températures froides allongent la durée des fermentations. Ce qui a pour conséquence de favoriser la production d’esters typiques aux ginjō

La variété de riz Akita Sake Komachi, propre à Akita et cultivée dans la préfecture, est un élément essentiel pour Takahashi-san. Selon lui, le brassage du saké « commence dans la rizière ». Il n’utilise que ses propres levures et, compte tenu de leur vigueur, il n’est pas nécessaire de remuer le moromi pour leur apporter davantage d’oxygène. L’objectif est de brasser de façon la plus « minimaliste » possible.

Pour ceux qui sont attentifs aux détails (🙋🏻‍♂️), et qui se demandent pourquoi on liste « Joto » comme producteur sur le site de la SAQ, c’est que Joto est un importateur / distributeur de saké qui se spécialise dans le jizake, soit les productions plus artisanales. Joto est donc un intermédiaire qui nous permet d’avoir accès à une panoplie de plus petits producteurs et de leurs marques de renom comme Shichi Hon Yari ou Fuku Chitose.


Accord

On essaie de marier l’intensité moins marquée du saké avec un plat plus délicat. Une crème glacée babahera à saveur de banane, dessert typique de Akita, ferait un agencement inusité, quoique intéressant. Même s’il ne s’agit pas a priori d’un saké de dessert, son nihonshudo est relativement bas à +1.5 (~24g/L de sucre résiduel), ce qui permet de faire des accords sucrés. L'arôme de banane est un marqueur classique des sakés ginjō. Accord complémentaire vous dites?

« Moi J’ADORE le boire dans mon bain!!! 🍶💦» - Asma BT, Fondatrice 


Dans un autre ordre d’idées, une salade estivale de crevettes nordiques, d’avocat et d’estragon, rappelant les notes anisées du Limited Release, fera un accord du tonnerre. Ou tout simplement le prendre à l’apéro, le genre de saké passe-partout, pouvant être apprécié en toutes occasions.


3. Funaki Shuzō Shinriki Junmai Ginjo - 300 mL

Kura: Funaki Shuzō 舟木酒造
Marque: Funaki 舟木
Cuvée: Shinriki 神力
Classification: Junmai Ginjō 純米吟醸
Seimaibuai : 60%
Riz: Shinriki 神力
Préfecture: Fukui 福井県

***

Prix: 17,75 $
Code SAQ: 14020601

Pour notre troisième choix, on s’attarde à un saké mettant de l’avant le terroir de la préfecture de Fukui. Cette cuvée fait aussi partie d’une mini-collection regroupant quatre autres brasseurs, ayant pour objectif d’exprimer l’essence d’une variété de riz spécifique au brassage du saké, ou shuzō kōteki-mai. Chez Funaki on travaille de nombreux shuzō kōteki-mai, mais on a voulu mettre en lumière le Shinriki. Ce riz a été croisé et cultivé pour la première au 19e siècle dans la préfecture de Hyogo. Sa vigueur et la grosseur de ses grains lui ont valu son nom signifiant « pouvoir divin ». Tombé dans l’oubli pendant plusieurs années, des fermiers de Fukui ont travaillé pour le cultiver de nouveau. 

Les principales caractéristiques organoleptiques du Shinriki, qui peuvent aussi être perçues dans ce saké, s’affirment dans cette contradiction entre la richesse des arômes et la teneur relativement faible en acides aminés (umami). Réussir à brasser ce riz afin qu’il dévoile sa véritable nature exige beaucoup de doigté. L’expérimenté maître-brasseur Kazunori Nojiri a commencé à travailler à 18 ans chez Funaki, pour être ensuite consacré tōji, 15 ans plus tard. 


Accord

La préfecture de Fukui se trouve dans la région de Chūbu, au centre de Honshū. Plusieurs mets traditionnels pourraient être d’excellents accords avec ce saké polyvalent. Le Seiko-don, ce plat de riz surmonté de crabe Seiko (version femelle du crabe Echizen), se marierait à merveille avec le Shinriki tempéré à 15-20°C. En réchauffant, il prend plus de place en bouche, sans développer trop d’umami qui viendrait masquer la délicate chair de crabe. Très satisfaisant pendant les mois d’hiver. Parlant de plat satisfaisant, le Shinriki bien frais serait sensationnel avec une guédille de crabe des neiges gaspésien. 


Voilà 3 sakés bien différents qui constituent 3 points de départ pour initier, ou poursuivre, votre aventure avec les accords et les températures de service du saké. On le répète assez souvent: il n’y a PAS de mauvaise réponse. Ayez du plaisir, c’est ce qui compte. Et surtout, partagez avec nous votre appréciation et les résultats de vos essais. On a hâte de vous lire!